Quarantaine: pas d’assouplissement en vue
- Frontalier France Suisse
- 9 sept. 2020
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Les directeurs cantonaux de la santé ont rencontré les autorités fédérales pour relayer le mécontentement populaire et évoquer des pistes afin d’atténuer cette mesure. Pour l’instant, elles ne semblent pas convaincre Berne

Source: LeTemps.ch
Après le masque, voici un nouvel objet de contestation: la quarantaine de dix jours imposée à ceux qui ont côtoyé un malade du covid ou qui rentrent d’un pays à risque. Il en était question lundi à Berne, où avait lieu une rencontre entre la Conférence des directeurs cantonaux de la santé, l’Office fédéral de la santé publique et le Département de l’intérieur. Mais selon nos informations, la Confédération ne compte pas assouplir cette mesure.
Si les Suisses ont suivi les autorités ce printemps, ils sont de plus en plus à trouver qu’il suffit. Il fallait s’y attendre. A cause de la fatigue devant un ennemi contre lequel l’arme fatale n’est pas encore inventée. A cause de pans entiers de l’économie qui souffrent. A cause des chiffres, qui montrent une augmentation des cas, mais très peu d’hospitalisations et de décès. Ainsi résume le conseiller d’Etat bernois Pierre Alain Schnegg: «Dans mon canton, nous avons aujourd’hui trois hospitalisations pour covid, dont une personne intubée. En revanche, nous avons davantage d’hospitalisations dues à des accidents sportifs. Pourtant, on n’interdit pas le sport!» Le ministre UDC bernois n’est pas un coronasceptique, loin de là, mais il pointe la question de la proportionnalité: «En Suisse, la responsabilité personnelle est au centre de nos valeurs. Elle ne peut s’exercer que si les gens comprennent les mesures qu’on leur impose. Or, de plus en plus de Suisses ne captent plus. Si nous devions faire face à une nouvelle vague et que la population ne suivait plus, ce serait alors très compliqué.»
«Quarantaine mal vécue»
Les conseillers d’Etat ont donc posé sur la table ce manque d’adhésion populaire: «Plusieurs cantons ont signalé que la quarantaine est mal vécue par une partie de la population et par certains secteurs économiques, sous forte tension», résume Rebecca Ruiz, conseillère d’Etat vaudoise socialiste. «Par ailleurs, l’activité des cellules de contrôle de ces quarantaines est chronophage et difficile», complète Mauro Poggia, ministre genevois de la Santé, MCG. Certains espéraient voir le banc des scientifiques montrer quelque souplesse. Raté, semble-t-il, la Confédération ne voulant pour l’heure pas prendre le risque de réduire les jours de quarantaine. Et alors que le nombre de cas ne reflète pas encore toutes les rentrées de vacances, l’ouverture des écoles et la reprise du sport amateur.
Pourtant, plusieurs pistes ont été abordées. Comme une réduction du délai de quarantaine, moyennant peut-être un premier test au bout de quelques jours: «Je pense qu’il est préférable d’observer une quarantaine plus courte qui soit respectée, plutôt que d’en imposer une trop longue qui ne le soit pas», avance Pierre Alain Schnegg. D’autant plus que les gens en quarantaine qui développent la maladie ne représentent qu’une petite proportion des malades. A Berne, c’est moins d’un quart. Autre piste de réflexion, relayée par Mauro Poggia: le port strict du masque au lieu de l’isolement pour les personnes de retour de régions à risque, ce qui aurait pour avantage de réduire les fraudeurs. «Ce sont des pistes qui ont été évoquées, mais qu’il est prématuré d’envisager dans l’immédiat», conclut le Genevois. Lequel déplore enfin des lacunes: «Quel est le pourcentage de personnes en quarantaine qui s’avèrent finalement positives et quel est ce pourcentage après cinq, six ou sept jours? Actuellement, l’OFSP n’a pas ces chiffres.» Contrariant. Sans attendre la Confédération, les cantons romands envisagent donc de faire parler leurs propres données.
Entre les cantons, en contact direct avec une population lasse, et la Confédération, soucieuse et redoutant une recrudescence de la maladie cet hiver, difficile de trouver un compromis sur la quarantaine. Mais les cantons ne baissent pas les bras: «J’appelle de mes vœux une réflexion poussée au niveau de la Confédération pour envisager des marges de manœuvre, comme par exemple de pouvoir retourner au travail en portant le masque après cinq jours d’isolement», conclut Rebecca Ruiz.
Auteur de l'article: Laure Lugon
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